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Point Macro

Le Japon, à la croisée des chemins

6 juin 2025

Notre série : La dette, grandeurs et décadences

Beaucoup a été écrit au sujet de la dette ces derniers jours. En particulier sur la dette japonaise et de la dette américaine. Ces deux pays sont fortement endettés depuis plusieurs années, et le sujet est revenu sur le devant de la scène ces derniers jours. Essayons d’y voir un peu plus clair. Commençons aujourd’hui par la situation au Japon.

Trente ans de déflation

La particularité de l’endettement du Japon réside dans sa genèse. Petit retour en arrière. Nous sommes à la fin des années 80. Le Japon, longtemps vu comme le principal rival économique des États-Unis, s’est vu trop beau. Ses actifs sont au plus haut. Les bulles sont partout.

Le Nikkei, l’indice phare japonais, se traite à plus de 50 fois les bénéfices. Des secteurs pourtant particulièrement cycliques par nature, comme les banques ou l’immobilier, se traitent à plus de 60 fois.

La bulle éclate à la toute fin de l’année 1989. L’indice a retrouvé ses niveaux de cette année là en 2024, 35 ans plus tard.

Le malheur des boursicoteurs japonais n’est que la partie immergée d’un iceberg bien plus profond.

A partir de 1992, c’est au tour des prix de l’immobilier de s’effondrer, réduisant à peau de chagrin le patrimoine des ménages.

Mais la population était déjà vieillissante, et il fallait à tout prix financer les retraites. Résultat : la consommation s’est effondrée au profit de l’épargne, pesant sur la croissance mais aussi sur l’inflation.

C’est le début d’une guerre de 30 ans des gouvernements et banquiers centraux japonais contre la déflation. Ce mal pernicieux autoréalisateur qui peut faire s’écrouler un pays. Quand les prix sont dans une spirale négative, les décisions d’achat sont en permanence repoussées, pesant de facto sur la demande, et donc sur les prix.

Les deux armes choisies pour lutter contre cette spirale négative ont été le recours massif à l’endettement et une politique de taux ultra-accommodante, autour de 0 % dès le début des années 2000.

 

Vous trouvez ici les fondements du fameux Carry Trade dont on a beaucoup parlé en août dernier, avec la possibilité d’emprunter du Yen à des taux quasi nuls pour acheter de la dette américaine, par exemple, à des taux nettement supérieurs.

Le retour de l’inflation

Alors qu’on la pensait morte et enterrée, l’inflation a fait un retour par la grande porte au Japon.

Pourquoi ? Parce que de nombreux facteurs structurels qui ont poussé le Japon vers la déflation sont en train de s’inverser :

Dans ce contexte, les Banquiers Centraux japonais ont, progressivement, commencé à normaliser leur politique monétaire à partir de l’été dernier. Cela avait d’ailleurs pris par surprise les « carry traders », provoquant le mouvement de panique du mois d’août.

Les taux sont passés de -0,10 % à 0,50 % pour l’instant, avec, probablement, d’autres hausses à venir. En parallèle, les achats d’obligations japonaises par la Banque Centrale Japonaise (BoJ) sont passés de 5 000 Mds Yens par mois en 2024 à 3 000 Mds d’ici la fin de l’année. La BoJ, qui détenait l’équivalent de 90 % du PIB japonais en dette japonaise, verra cette part baisser à 60 % d’ici 2030, comme le montre graphique de Berenberg ci-dessous.

 

Tous ces mouvements font mécaniquement monter les taux japonais, ce qui a entraîné une baisse de la valeur de dette japonaise.

 

 

Cette dette était en grande partie détenue par le marché privé (assureurs, banques etc.) qui doivent donc encaisser des pertes importantes et parfois liquider d’autres positions pour se couvrir. Une mauvaise nouvelle pour les États-Unis : les Japonais sont les plus gros détenteurs étrangers de la dette américaine, avec plus de 1 000 milliards de dollars.

Ces mouvements rendent également la dette japonaise de plus en plus attrayante. Il est donc logique de s’attendre à des arbitrages en sa faveur dans les prochains trimestres.

De quoi peser davantage sur la dette américaine ? Nous en discuterons la semaine prochaine.

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